Ordre des licenciements : critères de sélection

Si une entreprise se trouve dans une situation d’urgence financière, en prise avec des difficultés économiques importantes, elle peut être amenée à devoir réaliser des licenciements économiques. C’est une situation redoutée et éprouvante pour toutes les personnes concernées. La direction doit en effet se séparer de salariés estimés mais ce sont avant tout les employés qui craignent pour leur avenir. Il existe plusieurs cas de figure et types de procédures en fonction de la taille de l’entreprise, de la convention collective et du nombre des licenciements. Les critères pour déterminer un ordre des licenciements visent à garantir une certaine protection ou justice sociale et à exclure toute discrimination. Les représentants du personnel doivent être consultés et les critères légaux respectés.

En France, dans le cas d’un licenciement économique un employeur doit mettre en place, en fonction de sa taille, un Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Comme son nom l’indique, ce plan vise avant tout à limiter le nombre de licenciements ou même à les éviter.

L’ordre des licenciements en cas de Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)

Le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est un dispositif qui a pour but de limiter ou même d’éviter les licenciements mais aussi de favoriser le reclassement des salariés. Le terme de « plan social » est fréquemment utilisé pour parle du PSE. Le PSE est obligatoire pour les entreprises composées de plus de 50 salariés au minimum et lorsque le projet de licenciement concerne au minimum 10 salariés et cela sur une même période de temps de 30 jours. Pour les autres entreprises, ce dispositif reste facultatif.

L’intérêt du PSE pour les salariés et qu’ils peuvent bénéficier de plusieurs alternatives à la suite d’un licenciement. Ainsi, l’employé pourra avoir notamment une proposition de reclassement interne ou même en externe sur le territoire national, d’une mutation économique (actions de soutien à la création d’une nouvelle activité) et d’une aide à la formation. La réduction et ou l’aménagement du temps de travail peut aussi être une option, de cette façon, l’employeur évite un ou plusieurs licenciements. De plus, le PSE impose de réaliser un plan de reclassement destiné aux salariés avec des caractéristiques sociales ou bien de qualification rendant une réinsertion professionnelle difficile. Il en va de même pour les salariés âgés.Le PSE doit être mis en place par l’employeur ou bien par un accord majoritaire d’entreprise. Dans tous les cas, c’est la Direccte (Direction régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) qui valide et homologue le contenu du plan. Vous pouvez retrouver de plus amples informations sur le PSE directement sur le site du service public.

Accord collectif ou document unilatéral

Concernant l’ordre des licenciements, dans le cadre d’un PSE c’est la convention ou l’accord collectif qui a été négocié et désormais applicable qui a fixé les critères. On parle ainsi d’un « accord PSE » et dans ce cas, l’employeur est obligé de respecter ces critères pour le choix des personnes touchées par le plan social, mais aussi pour le calendrier des licenciements, les modalités d’information, etc. Par exemple, l’accord collectif peut indiquer qu’une partie seulement des salariés est concernée par la procédure de licenciement ; il peut s’agir uniquement des salariés d’un ou de plusieurs établissements.

Dans le cas d’un PSE qui est établie par un document unilatéral, c’est-à-dire le cas d’un PSE ou l’employeur préfère la voie unilatérale sans négociation préalable d’un accord. Il revient à l’employeur de définir le contenu du PSE et les conditions de mise en œuvre du licenciement (et le discuter avec le comité d’entreprise). Ici, le choix de l’ordre des licenciements doit s’effectuer au sein de chaque zone d’emploi qui est définie par l’Insee. Cela signifie que si plusieurs sites de la société sont situés dans une même zone d’emploi, les salariés licenciés sont sélectionnés au sein de ces sites et cela même si les emplois supprimés ne concernent eux qu’un seul site.

Note

Il existe désormais la possibilité de négocier un accord PSE partiel, qui se concentre au contenu du PSE (éviter ou limiter le nombre de licenciements), sans les modalités de mise en œuvre des licenciements. L’employeur peut définir ces modalités via un document unilatéral.

Règles et choix des critères de sélection pour l’ordre des licenciements.

Si l’employeur n’est pas obligé de réaliser un PSE, un accord peut prévoir qu’une partie seulement des salariés sont concernés par la procédure de licenciement. Et il peut s’agir alors d’uniquement des salariés d’un seul établissement ou non. Avec ou sans PSE, l’employeur doit prendre en compte des critères pour l’ordre des licenciements.

Les 4 critères obligatoires pour définir l’ordre des licenciements

De manière générale, l’employeur est contraint de respecter des critères de sélection. En France, le code du travail spécifie que les critères que l’employeur peut définir pour réaliser un ordre des licenciements doivent obligatoirement tenir compte de 4 éléments ou critères :

  • Les charges de famille (nombre d’enfants, parent isolé, etc.)
  • L’ancienneté dans l’établissement ou l’entreprise
  • Une situation qui peut rendre une réinsertion professionnelle particulièrement difficile (par exemple un salarié handicapé ou âgé)
  • Les qualités professionnelles appréciées par catégories professionnelles

Il faut noter que l’employeur est libre de privilégier l’un de ces critères, à condition toutefois de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus. Mais cette liste n’est pas limitative, d’autres critères peuvent aussi être librement ajoutés. Mais il est strictement interdit à l’employeur de baser son licenciement sur des critères d’ordre discriminatoire (sexe, religion, origine, etc.). Il ne peut non plus privilégier un salarié à temps plein qui exerce dans l’entreprise des fonctions de même nature qu’un temps partiel.

Système de « pondération » et exemple de calcul pour l’ordre des licenciements

Il s’agit donc d’un système de pondération, l’on peut ainsi attribuer une note (un système de points) à chacun des critères et cela afin de les hiérarchiser. À ce sujet, il n’existe pas de règles précises définies par le texte de loi : libre à l’employeur d’établir cette pondération et d’identifier ainsi les salariés concernés par les licenciements.

Un exemple de calcul :
Un employeur peut attribuer 4 points pour le critère de la situation du salarié, 2 points pour les qualités professionnelles, 1 pour les charges de famille et 3 points pour l’ancienneté.


Mais ce calcul peut encore être précisé :
Pour l’ancienneté par exemple, il peut décider de donner 1 point si l’ancienneté est comprise entre 0 et deux ans, 2 points entre 3 et 5 ans d’ancienneté, 3 points au-delà de 6 ans d’ancienneté.

Note

Si l’entreprise effectue un licenciement individuel pour motif économique, il doit aussi prendre en compte les critères d’ordre pour choisir le salarié concerné par ce licenciement.

Dans tous les cas, vous devrez préalablement consulter les représentants du personnel qui rendront alors un avis sur les critères. Il s’agit désormais du Comité social et économique (CSE), qui est la nouvelle instance représentative du personnel. Il s’agit de la fusion du CE (Comité d’entreprise), des DP (Délégués du personnel) et du CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Pour que cette instance puisse donner son avis sur les critères, l’information délivrée se doit d’être claire et exhaustive. Le défaut de consultation des représentants du personnel en cas de licenciement de moins de 10 salariés sur 30 jours est passible de sanctions civiles et pénales.

Catégorie professionnelle et dispenses d’application des critères de l’ordre des licenciements

L’ordre des licenciements est aussi apprécié au niveau de la catégorie professionnelle visée par le projet de licenciement. Et il existe évidemment des situations dans lesquelles l’employeur est dispensé d’appliquer les critères d’ordre de licenciement. C’est notamment le cas, si le projet concerne tous les postes d’une même catégorie professionnelle ou le seul poste d’une catégorie professionnelle. Une récente jurisprudence de la Cour de cassation de 2015 a une nouvelle fois définie la catégorie professionnelle comme étant « l’ensemble des salariés qui exercent, au sein de l’entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ».

Note

Si l’employeur a mis en place un plan de départ volontaire, les règles pour l’ordre des licenciements ne peuvent s’appliquer entre les salariés qui acceptent volontairement leur départ. Elles ne s’appliquent qu’aux salariés qui font l’objet d’un licenciement économique et qui n’ont pas accepté le plan de départ volontaire. De même en cas de mise en place d’une rupture conventionnelle collective.

Ordre de licenciements : information de l’employé et litiges possibles

Information du salarié

À la suite de son licenciement, le salarié peut connaitre les critères retenus ayant justifié sa désignation. C’est encore le Code du travail qui précise les différentes démarches à suivre du salarié pour connaitre les différents critères retenus. Tout salarié peut en effet les demander dans un délai de 10 jours à compter de la date de son départ de l’entreprise. La demande doit être adressée par une lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par remise en main propre contre décharge. L’employeur doit lui répondre dans les 10 jours suivant la présentation de la lettre de l’employé et dans les mêmes conditions.

Litiges et sanctions

Dans le cas où l’employeur n’apporte pas de réponse ou bien ne respecte pas le délai de réponse légal, le salarié peut alors réaliser une demande de dommages-intérêts en raison du préjudice subi.

Les erreurs dans le processus de l’ordre de licenciements peuvent avoir des conséquences importantes. En effet, la non-observation des règles ou le cas d’irrégularité expose l’employeur au paiement de l’amende prévue pour les contraventions de 4ème classe. De plus, le salarié peut alors aller aux prud’hommes afin de demander des dommages et intérêts et cela en raison d’un préjudice issu de l’illégalité de traitement subie. Afin d’éviter cela dès le départ, le processus de sélection sociale doit être soigneusement préparé.

Veuillez prendre connaissance des mentions légales en vigueur sur cet article.