Lorsque vous établissez une facture, vous y déclarez généralement la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Toutefois, vous ne pouvez pas la conserver : vous devez la verser à l’administration fiscale. La procédure dite d’autoliquidation de la TVA change la donne ; ce n’est pas vous, en tant que prestataire, mais votre client qui doit payer la TVA au service des impôts.

La procédure d’autoliquidation : qu’est-ce que c’est ?

En anglais, on parle de « reverse charge », ce que l’on pourrait traduire par « inversion du calcul ». Cette appellation est plutôt explicite puisque l’autoliquidation de la TVA signifie, en droit fiscal, l’inversion de la dette fiscale, et plus précisément de la collecte de la TVA. Ainsi, la TVA devient une charge pour l’acheteur, qui est responsable de l’autoliquider, c’est-à-dire de la déclarer et de la payer lui-même. En d’autres termes, il doit s’auto-facturer la TVA.

Cas normal Autoliquidation de la TVA
Le vendeur/prestataire de service doit payer la TVA L’acheteur/bénéficiaire de service est redevable de la TVA

Quel est l’objectif de la procédure d’autoliquidation ?

Dans la pratique, la procédure d’autoliquidation peut simplifier le paiement de la TVA, du moins pour le vendeur, et réduire ainsi la charge administrative. Mais surtout, cette procédure vise à lutter contre les abus et la fraude fiscale. L’autoliquidation permet notamment de combattre ce que l’on nomme la fraude carrousel. Au sein de l’Union européenne, cette fraude concerne souvent les opérations transfrontalières entre entreprises. En effet, dans le cadre des livraisons intracommunautaires de biens, la TVA n’est pas appliquée par le vendeur : l’obligation de payer la TVA incombe à l’acheteur via le mécanisme d’autoliquidation. Le mécanisme de fraude repose alors sur des entreprises qui se revendent des biens obtenus en exonération de TVA auprès de fournisseurs dans d’autres États de l’Union européenne. Selon les estimations, cette fraude représente une perte de plusieurs milliards d’euros par an pour l’État français.

Exemple : l’entreprise A en Allemagne livre des marchandises à l’entreprise B en France sans TVA (transaction intracommunautaire). L’entreprise B revend ensuite les marchandises en France à l’entreprise C, en facturant cette fois-ci la TVA. Cependant, au lieu de reverser la TVA collectée à l’État, l’entreprise B disparaît sans payer, générant ainsi une perte pour l’administration fiscale. Ce mécanisme, où des sociétés éphémères appelées « Missing Traders » échappent au paiement de la TVA, se répète souvent dans plusieurs pays de l’UE, créant un cycle frauduleux.

Dans le cas de la fraude carrousel, l’entreprise acheteuse peut réclamer la TVA en tant que TVA déductible sans que le vendeur initial n’ait réellement reversé la taxe. Ce cycle de transactions permet aux sociétés frauduleuses de collecter de la TVA sans la reverser, créant ainsi un manque à gagner pour les administrations fiscales. Le mécanisme d’autoliquidation vise à réduire et à empêcher cette possibilité. Désormais, pour obtenir un remboursement de la TVA, l’acheteur doit indiquer dans sa déclaration la TVA due, rendant le système fiscal moins perméable à ce type de fraude. Dans le passé, cette fraude affectait notamment le commerce des tablettes et des téléphones portables, ainsi que le secteur du bâtiment.

Note

Lors des opérations intracommunautaires, l’obligation de payer la TVA incombe à l’acheteur grâce au mécanisme d’autoliquidation.

Quand l’autoliquidation de la TVA s’applique-t-elle et pour qui ?

Dans de nombreux cas où des biens et des services sont achetés d’une société basée à l’étranger, la procédure d’autoliquidation s’applique. Dans certains cas, le mécanisme est aussi obligatoire pour les livraisons et services entre entreprises sur le même territoire national. Mais la procédure ne s’applique que si le bénéficiaire est une entreprise ou une personne morale.

Quelles sont exactement les transactions soumises à l’autoliquidation ? D’après les articles n 283 et n 1695 du Code général des impôts, il s’agit des cas suivants :

  • Autoliquidation de la TVA due à l’importation (TVAI). Cela reste une option pour les entreprises assujetties à la TVA et qui sont établies dans l’UE ou en dehors tout en respectant 4 critères : un minimum de 4 importations au sein de l’UE, avoir un système de gestion des écritures douanières et fiscales avec suivi des opérations d’importation, ne pas avoir commis d’infractions douanières ou fiscales au cours des 12 derniers mois et enfin sur cette même période avoir une situation financière satisfaisante. Cette option doit être demandée et autorisée par les douanes.
  • Sous-traitance dans le BTP. L’autoliquidation de la TVA est dans ce cas obligatoire : lorsqu’une entreprise donne un contrat de sous-traitance à un prestataire pour l’exécution de travaux de bâtiment pour la construction pour la rénovation des immeubles, les travaux publics et ouvrages de génie civil, les travaux d’équipements des immeubles, les travaux de réfection ou de réparation d’un immeuble et enfin les opérations de maintenance et de nettoyage.
  • L’autoliquidation de la TVA est obligatoire pour les prestations de services et livraisons portant sur les déchets neufs d’industrie et des matières de récupération.
  • Pour les services électroniques et de télécommunications.
Note

Pour le BTP, vous pouvez retrouver la liste exhaustive des travaux concernés par le mécanisme d’autoliquidation ici.

Pour les transactions transfrontalières, les prestations de services et les livraisons intracommunautaires de biens, l’autoliquidation de la TVA est aujourd’hui appliquée dans toute l’UE. Cependant, pour certaines opérations nationales, les règles varient d’un pays à l’autre : ce qui est soumis à l’autoliquidation dans un État membre peut être traité différemment dans un autre. Il existe aussi le projet de créer un mécanisme d’autoliquidation généralisée (MALG), mais ce projet est encore en discussion au sein des États membres de l’UE.

La procédure d’autoliquidation est aussi importante pour les PME et les indépendants : si vous participez à des affaires internationales, vous êtes considéré comme entrepreneur. Il est dans ce cas nécessaire de posséder un numéro de TVA intracommunautaire si vous souhaitez opérer eu sein de l’UE. Ce numéro est délivré par le service des impôts.

Mention de l’autoliquidation de la TVA sur les factures : exemples

Si vous fournissez un service qui relève de la procédure d’autoliquidation de la TVA, indiquez sur la facture la mention « Autoliquidation » conformément au 13° du I de l’article 242 nonies A de l’annexe II au CGI.

Toutefois, vous pouvez aussi utiliser d’autres formulations, notamment pour les bénéficiaires de services, acheteurs non francophones, il est recommandé de mentionner la procédure d’autoliquidation en anglais : « VAT due to the recipient » ou « Recipient is liable for VAT ». Vous pouvez aussi inscrire la mention dans la langue nationale correspondante. Dans le tableau ci-dessous, vous trouverez quelques traductions du terme :

Pays Traduction
Allemagne Reverse-Charge-Verfahren
Bulgarie обратно начисляване
Danemark omvendt betalingspligt
Estonie pöördmaksustamine
Finlande käännetty verovelvollisuus
Grèce Αντίστροφη επιβάρυνση
Italie inversione contabile
Royaume-Uni, Irlande Reverse Charge

Important : en plus de cette mention et des informations obligatoires, une facture destinée à un autre pays de l’UE doit contenir à la fois le numéro de TVA intracommunautaire du prestataire de service (vendeur) et celui du bénéficiaire du service (acheteur).

Veuillez prendre connaissance des mentions légales en vigueur sur cet article.

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